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Voyager seule en Inde - Voyage Inde - Kérala Inde du Sud - Cap Comorin - Train à Bombay - Car Inde - Seule à Bombay - Goa - Les Backwaters du Kérala

ART. N°18. Brève rencontre à Goa

En montant sur la terrasse pour rejoindre ma chambrée, un des deux indiens tapote sur son ordinateur portable. Dans un genre d'anglais qu'on entend souvent en Inde, il se présente : Jal. Il m'a écouté jouer de la guitare et aimerait m'entendre davantage, ses yeux perçant et charmeurs me touchent. Mais je refuse gentiment sa demande et rentre dans ma chambre, m'occuper en enrichissant mon anglais avec Assimil, livres d'exercices et dictionnaire.

Le soleil commence à décliner et les ombres mauves du crépuscule s'étendent à l'horizon sans que je m'en aperçoive. Il est grand temps de sortir pour dîner, Jal est toujours là. Je suis quelque peu agacée par la façon dont il me harcelle de questions : D'où je viens, mon métier etc.. et pourquoi je suis seule ici ? Je presse le pas pour partir mais il m'apostrophe : " Attendez, attendez !", je reste à l'écoute en croisant les bras. Originaire et habitant de New Delhi, il est venu réaliser un projet d'hôtel sur la côte et trouver un terrain. A ce moment-là, son collègue arrive les bras chargés de samossas, chips et bières. Un peu piégée par la situation, étant donné que j'ai soin d'éviter certains endroits seule, surtout après la tombée de la nuit. Sur la terrasse commune après tout qu'est-ce-que je risque ? 
S'ils se font un peu trop insistant, la famille de la Guest House, surveillant mes allées et venues, pourrait intervenir.

La soirée est riche d'échanges et de rires, mon basic English occasionne parfois des quiproquos rigolos. Cette petite fête m'a permis de me changer les idées et de dormir comme un bébé, les aboiements des chiens devenus lointains.

Permettant à un rayon de soleil de s'infiltrer dans la pièce, en ouvrant les yeux, je distingue d'abord que cette lumière projette un rai oblique sur le lit. Mes yeux se referment mais mon esprit s'agite. Il faut que je trouve un centre Ayurvédique pour travailler mes massages pour ne pas perdre la main. Après mon club sandwich quotidien, je visite un premier centre de massage en ville. Les cours sont onéreux, les responsables m'ont mal reçue, désagréables, je suis désappointée.

En rejoignant la plage repérée la veille, je laisse les fracas du monde s'estomper peu à peu derrière moi, me concentrant sur mes pieds en train de fouler des minuscules galets, des coquillages et des fossiles. Une vague se forme, s'enfle, monte vers les cintres, une splendide montagne liquide. Cette houle m'impressionne, la crainte me gagne pour une baignade en solitaire.

Mais un petit groupe de jeunes indiens plongent dans la méchante houle . J'approche lentement sur le sable mouillé et chaud et plonge la tête la première dans les vagues furieuses, sans être saisie. Heureuse comme un poisson dans l'eau, à chaque plongée, je me sens rassurée, je sais que si je m'aventure trop longtemps la tête sous l'eau, l'un des Indiens se précipiterait vers moi, à coup sûr. Des enfants jouent au bord de l'eau sur le sable me rappelant mon fils à leur âge. Longtemps, je demeure assise au bord de l'eau, la tête nue, laissant mes cheveux blonds s'imprégner de la chaleur du soleil. Ce moment de plaisir est magique après la fournaise de Bombay.

En arrivant sur la terrasse de la Guest, sur le palier, Jal est là, sans son collègue. Jal insiste, il veut absolument que je lui joue une morceau à la guitare, je finis par céder en m'exécutant au mieux. Son air admiratif me touche et je perçois son désir. Il improvise un magnifique numéro de charme, ce petit manège se poursuit quelque temps jusqu'à me déclarer sa flamme. Jal fait déjà des projets, son hôtel où je pourrais masser, la connaissance de ses parents à New Delhi, le grand jeu.

A quarante sept ans, fréquenter un jeune dans la fleur de l'âge de trente deux ans, est une utopie. Difficile de comprendre attitudes et réactions de ce peuple si différent des Européens, la barrière de la langue, les coutumes surprenantes de ce pays. Mais il reste sourd de mes arguments. Ses yeux de velours continuent de me charmer.

Sa présence ravive le passé avec une force qui me chavire, il a ouvert les vannes à un torrent de souvenirs. Lorsque qu'il apparaît sous mes yeux de femme célibataire, de vivants souvenirs de ce que j'ai éprouvé en des anciens jours, rend difficile de lui résister.

Jal désir un "French Kiss" comme il dit. En Inde, les couples ne s'embrassent pas souvent, bien que la jeune génération évolue à ce sujet. Jal désir goûter le plaisir d'un baiser.

Il s'assied près de moi sur le lit, me prend délicatement la main, l'embrasse de ses lèvres pulpeuses, me regarde de ses yeux perçants, mon cœur cogne dans ma poitrine. Il me caresse le bras de petits cercles, je le sens nourrit d'un désir ardent. Jal se penche vers ma bouche, glisse une main dans mon dos, je me détourne. Je lui souffle : "Pour ton bien comme pour le mien, nous devons cesser cette aventure". Il me fixe sans bouger. Alors je me lève et ouvre la porte de ma chambre en baissant les yeux. Sans oser le regarder, je demande : "Je fais appel à ton sens de la dignité et du respect de la femme".

Triste comme un ciel noir, honorablement il sort, laissant sa main glisser sur ma joue rougie d'émoi. A l'aube, son collègue et lui repartiront pour New Delhi.

Vers sept heures, je les entends sur la terrasse. J'ouvre la porte, me dirige vers mon tendre indien, ouvre les bras, sa bouche sur ma bouche, nos langues se mêlent en un long et tendre baiser. Ses yeux reflètent une lueur de bonheur. "Je te fais plus de mal que de bien, ma conduite est absurde, plus jamais nous nous reverrons, et je suis sincère". Il m'écoute en silence, en me caressant le dos de la main, affligé.

Je me libère gentiment : " Good bye and good Luck Jal ! "

Son collègue le hèle du rickshaw arrivé. Jal fait un dernier signe de la main en montant dans le triporteur puis baisse la tête pour feindre ses pleurs. Mes joues se mouillent mais je n'ai pas envie de pleurer. Ai-je bien ou mal fait ?

Après cet épisode, une sensation de vide s'installe dans mon cœur.

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